Pages

mardi 29 août 2017

Le Serpent à Sornettes au Pertuis



A la base, l’objectif était d’aller visiter une voie dans la paroi d’Anterne aux Fiz avec Stéphane Hanssens. Aller dans cette face demande une météo irréprochable le jour même ainsi quelques jours auparavant. Après quelques hésitations, au vu de la météo mitigée, nous renonçons à ce plan et cherchons un plan B. Merci météo pourrie de m’avoir poussée à la salle et fait discuter avec Pierre qui me parle du Serpent à Sornettes au Pertuis, une voie de Mussato.
 
J’avais déjà entendu parler de cette voie mais avais trouvé peu d’infos. Je ne connais pas du tout le Pertuis et seul le topo de Mussato dont l’accès est assez succinct montrait un peu la voie. 

Le topo de Mussato

S’en suit une véritable chasse aux trésors pour comprendre où se garer puis quelle piste emprunter. Armée des trois lignes de l’accès de Mussato, de Google Maps en mode satellite et des quelques récits de courses rentrés sur Camptocamp dans des voies au Pertuis, mais bien sûr pas dans le Serpent à Sornettes, j’entrecroise les informations pour déduire à peu près quel chemin prendre et où se trouve notre voie dans la grande face du Pertuis.

Parking et approche
 En réalité, la voie se trouve bien en face Sud, quelques dizaines de mètres après le Pilier des Chercheurs d’Or qui annonce le changement d’orientation de la face dans le beau mur gris qui laisse présager un calcaire compact et exigeant !

La face et quelques repères
  Nous partons donc le samedi soir pour dormir sur le parking. Levé 6h et première déception quand nous nous rendons compte que la bouteille de gaz est vide… Il faudra faire sans café pour se réveiller. L’approche se passe plutôt bien jusqu’au pied de la face et on se dit que les 2h annoncées sont assez exagérées. Mais nous ne sommes pas au pied de la voie… Notre stratégie est de longer la face vers le Sud jusqu’à tomber sur la voie en espérant ne pas l’avoir déjà dépassée ! Très vite, nous nous retrouvons sur des vires herbeuses et aériennes où il ne vaut mieux pas tomber. Bref, on n’avance pas, on longe une face avec du rocher qui ne nous fait vraiment pas rêver et on commence à douter que c’est bien par là. Finalement, on persiste encore vers le sud en se disant que le beau rocher sera certainement derrière ce pilier qu’on devine. Cette fois, on a de la chance et après 2h30 d’approche, nous sommes enfin au pied de notre voie qui a l’air vraiment classe.
En réalité, pour l’approche, il vaut mieux tirer au maximum à droite en diagonal dans la forêt, au mieux, pour atteindre le pied de la face au niveau du pilier des Chercheurs d’Or comme sur le chemin Google Maps.

L1 7b : rocher moyen et section bloc
 Steph part dans la première longueur en 7b qui n’a pas l’air magnifique et qui louvoie dans du rocher moyen. Un bon crux bloc au milieu de la longueur nous fait serrer les prises à froid et amène l’onglée qui va bien. Au moins, on est dans l’ambiance !

Début de L3 et belle dalle grise de L2 en dessous
 Le soleil arrive au premier relais et je pars dans la deuxième longueur en 6c+ un peu réchauffée. C’est une longueur sur trous dans un beau rocher gris. Sans une trace de magnésie, il faut bien réfléchir pour choisir l’itinéraire entre les points. Ca louvoie beaucoup, le serpent se met en place !

L3 7b+ : mur technique à petites prises
 Le relais est un peu posé au milieu de nulle part dans la dalle et Steph continue dans L3 en 7b+. Une section vers la fin de la longueur lui demande pas mal de réflexions pour finalement trouver la prise salvatrice. Finalement, ce n’est pas si dur.

L4 7a+ et la fin du rocher péteux pour Steph
Le pilier de L4
 L4 en 7a+ commence dans un dévers jaune et péteux. Ca ne me donne pas bien envie… Les 6 premiers mètres de la longueur doivent être les moins beaux de la voie. Mais après un bon fight, je me rétablis sur une dalle et remonte un pilier incroyable, un coup d’un côté, un coup de l’autre et me fait complétement oublier le début de longueur.

L5 8a : court et intense
 Nous voilà au pied du premier 8a, les dégaines sont quasiment toutes en place ! Le début en fissure est un peu mouillé mais la suite sur des trous et règles en traversée vers la droite est parfaite. Steph se bat bien et bloque sur une redescente. La longueur est vraiment courte, une dizaine de mètres, et donc bien teigneuse… J’essaye quand même en moul, flashée, et quelques secondes plus tard, me retrouve à pendouiller au bout de ma corde au niveau de la redescente. En fait c’est un peu dévers !! Petite remontée sur corde où je force tout ce que je peux et c’est reparti ! On essaiera les mouvements en tête la prochaine fois.

L6 8a : fin dalleuse
Ca arque jusqu'au bout
La longueur 6 est 8a aussi et traverse vers la gauche cette fois. Un gros pas de bloc au quatrième point me laisse perplexe et je poursuis en me rétablissant dans une dalle grise, un peu salpêtreuse et glissante, ultra technique mais sacrément classe.

L7 7c+ : ça part à gauche
puis ça revient à droite
 La suite en 7c+ est assez étonnante, on fait un gros crochet à gauche pour ensuite revenir exactement au-dessus du relais, seulement 10 m plus haut. A ce rythme, on ne monte pas bien vite dans la face !! Le serpent est bien en place.

L7 toujours en dalle...
  Steph prend bien son temps et reste posé, jusqu’au relais qu’on négocie par le haut (!) et enchaîne cette belle longueur, laborieuse et exigeante. Je ne suis pas loin de faire pareil, flashée, mais craque à 50 cm du relais et pendule au pied de Steph !
 
Les bons sandwichs de Cedric
Il est temps de faire une petite pause pour recharger les batteries. Mais parfois, il ne vaut peut-être mieux pas s’arrêter… Je repars dans la longueur suivante L8 en 7a+. Une traversée à droite, courte, avec peu de points et… peu de prises ! Je galère un bon moment à trouver une solution et au moment où j’envisage de me laisser tomber, j’essaye quand même de pousser sur ces pieds à plats et miraculeusement, ils restent en place et j’atteins une bonne prise ! Ce rocher est incroyable, depuis la longueur précédente, il est ultra adhérent !

Sans les mains dans L8...

Steph arrive au bout de L8 7a+
 Steph poursuit dans L9 en 7a+ également. Tout aussi courte mais un peu plus teigneuse. Je commence à sentir toutes les douleurs de mon corps, la peau des doigts, les pieds, les biceps. Et quand on commence à s’écouter c’est vraiment pas bon !

L9 7a+ tout en trav encore
 En subissant, je poursuis dans L10 en 8a. Je n’y vais pas pour enchaîner mais pour monter la corde. Points à points, laborieusement, j’avance. Ma lucidité s’en est allé, si bien que je ne vois pas le relais et continue dans la longueur suivante en 7b+. Ca ne me choque pas, la longueur était mentionnée comme longue et je suis tellement au bout que je ne me rends même pas compte que c’est plus facile !! En fait, je ne trouve même pas la suite beaucoup plus facile même si je grimpe mieux entre les points.

Avant la fin des haricots...
 J’arrive à la vire suivante complétement explosée, après 55 m. Et là mon corps se met automatiquement en mode survis : relais, hissage, assurage, manger, boire, se coucher, manger, re boire et… éventuellement assurer ! Pauvre Steph ! Ca va qu’il ne s’arrête pas à ça. Il me félicite de l’effort et me dit que j’ai fait les deux longueurs… Hmm c’est vrai que c’était un bel effort ! En échange, pour qu’il ne soit pas en reste, je lui propose gentiment de faire les deux longueurs suivantes en une qui nous mèneront au sommet.
 
Cuite à R11...
L12 est coté 6b+ et L13 7b, on se dit que ça va enfin dérouler mais pas du tout. On a droit à un bon pas de bloc pas très joli. Quant à la dernière longueur, elle remonte un pilier à droite d’une cheminée. On était tellement éclaté qu’on a préféré passer par la cheminée et observer le pilier à la descente ! Méfiate, la fin ne déroule pas du tout. Il faut en avoir encore un peu sous le coude pour ne pas tomber ou tout simplement pour apprécier.

Arrivée au sommet
 La descente se fait en rappel en évitant les relais desaxés et en reclippant quelques dégaines. A 19h30 on avait bien mérité notre tablette de chocolat au pied de la voie !

Sommet !
 Le retour au camion était bien plus rapide en connaissant l’accès et en descendant directement dans la forêt plutôt qu’en longeant la falaise. A 21h, nous étions au camion après une bonne grosse journée d’effort.
La voie est franchement classe, à grosse dominante dalle technique et exigeante. Et envisager l’enchaînement à la journée demanderait beaucoup de travail et reste un bon défi. Mais peut-être bien que ça pourrait me motiver !
Merci Steph pour cette belle journée !



samedi 1 juillet 2017

Greek road trip part 2 : Kyparissi ou la beauté paisible


Il est temps de découvrir le site voisin de Leonidio : Kyparissi. Situé à 1h de route de Leonidio, le village de Kyparissi tranche avec la vie animée que l’on trouve à Leonidio. Le petit village est isolé et entouré de collines et de belles falaises. L’ambiance est plus paisible et on croise peu de grimpeurs. Enfin, pour l’ambiance c’était sans compter sur les copains pyrénéens qui animent les falaises, le village et plus si affinités ! La plage devient vite notre emplacement fétiche et quasiment privatisé.

Seuls au monde...
 
Le secteur sur lequel nous avons porté notre intérêt est Babala. La barre est nichée au sommet de la colline et proposent des concrétions sur minimum 2km… Un petit air de Ceüse pour l’étendue de la barre mais un gros goût de la Ramirole quand il s’agit de grimper ! La falaise est exposée Est et passe à l’ombre à partir de midi. Compter entre 35 et 45 min pour atteindre le pied des voies. L’approche se fait en plein soleil au pire moment de la journée mais le sentier est bon et pas trop raide, c’est moins pire que Ceüse ! Il y a plusieurs autres secteurs à Kyparissi, tous plus abordables, mais nous ne les avons pas visités.

Seulement un bout de la barre de Babala mais déjà bien plus que zone regroupant les voies existantes
 
A Babala, les voies sont éparpillées sur 800 m, loin d’être collées les unes aux autres, il reste donc un potentiel d’ouverture juste énorme.  Elles passent par les plus belles concrétions de la falaise et il est dur de choisir une voie qui sort de lot…

Camille dans la ligne évidente de Carpe Diem 8b
 
Le seul point négatif de ce secteur est que le niveau est élevé. Les belles voies commencent à partir de 8a et vu le style, il est plus facile d’aller s’échauffer en repérant les mouvements du projet de la journée que d’aller se retourner les doigts dans les quelques voies en 7 qui n’échauffent d’ailleurs pas pour l’effort de conti sur colos qui suivra.

Serge sort toute sa technique de genoux dans les colos de Kyparissi
 
Là encore on trouve assez vite notre rythme. Cédric part bille en tête pour essayer un projet de Quentin Chastagnier dans la grotte : « Gorilles Extension ». La voie raye le plafond et reste à être défricher et déchiffrer. Après plusieurs montées pour intégrer le bas, il bute à la sortie du dévers, aucune marque, des prises sales et un point plutôt loin ne facilitent pas la prospection. Pour la petite histoire, il sera sauvé par la perche d’amis français ! Une fois la corde en place, il trouve la séquence et enchaînera la voie quelques jours plus tard en proposant 9a.

Cédric dans Goriles Extension 9a
 
Pendant ce temps, j’établis une stratégie ultra efficace qui consiste à s’échauffer doucement dans la voie qui attire l’œil, bien repéré les mouvements et surtout les genoux, puis enchaîner au premier essai derrière. En général, l’enchaînement de ces voies longues puise pas mal dans les réserves et il reste peu de jus pour la fin de journée. Du coup, la dernière voie de la journée se révèle être un essai à vue « a muerte » dans une nouvelle voie qui se concrétisera le lendemain à l’échauffement !

Camille fait parler le biceps dans Carpe Diem 8b
 
Un bon rythme qui me permettra de voir un paquet de jolies voies comme « Advocatus Diaboli » 8a+ où l’on remonte un mur léger dévers entre deux grosses colos, l’effort épuise le corps entier (!), « Octo plus » 8a+, un mélange de colos et de grimpe en dévers plus classique pour finir par une sortie teigneuse sur croûtes et trous, « La dernière goutte pour la route » 8a+, bloc juste sous voire au niveau du relais et où il faut grimper jusqu’à la vire au-dessus pour clipper le relais tranquillement et « Carpe Diem » 8b qui, après une première partie physique, remonte une colo unique, évasée et à crépis. A faire également la classique en 8a « Léodokardos », ratée de peu à vue, qui propose tellement de colos qu’on s’y perd et s’y fatigue d’hésitation !

Le rythme et le cadre qui rendent heureux !
 
Cédric finit sa découverte de Babala en repérant « El Salvador », un autre projet qui évolue au fil de ses montées mais dans lequel il prend à chaque fois toujours un peu plus de plaisir! Après la casse de quelques prises, il finit par y venir à bout, non sans mal, et propose 8c+. Avis aux amateurs, la ligne est superbe !

Brossage intensif dans Goriles Extension 9a

Finalement, bien que le secteur soit déjà connu, cette falaise est loin d’être exploitée à son plein potentiel et l’avenir nous réserve encore de bien belles voies… On a déjà hâte d’y retourner !

Une idée de la taille du mur avec sa partie équipée et un petit grimpeur dans Leodokardos 8a pour donner l'échelle !


 

lundi 26 juin 2017

Greek road trip part 1 : Leonidio la populaire !


Leonidio est devenue, depuis quelques années, la nouvelle destination grimpe à la mode. Assez curieux et en quête de nouveaux sites à découvrir, nous optons pour le Péloponnèse, en plein mois d’avril, non sans quelques doutes sur la météo…

Linka encore toute sage sur les routes italiennes
Linka faisant maintenant partie de la famille, l’option choisie pour rejoindre notre contrée idyllique est le ferry. C’est loin d’être le plus rapide ni le plus économique mais ça a l’avantage de nous permettre de dormir au bord de la mer tous les soirs et d’observer notre « poisson-chien » batifoler dans l’eau chaque matin… Et ça, ça n’a pas de prix !
 
A bord !

A noter, que pour les camions en classe 2 et entre avril et octobre, il est possible de prendre l’option « Camping on Board » sur le ferry pour 5€ de plus. Le surcoût est bien plus important quand le camion est en classe 1… Cette option permet de rester dans son véhicule pendant le trajet, donc de bien dormir, et donne accès à des douches. Bref un vrai camping !

Terres grecques en vue !
La route pour aller à Leonidio est une route côtière en bord de mer plutôt sinueuse. Il y a bien 1h30 de virages avant d’arriver à la petite ville entourée de la mer d’un côté et de falaises abruptes de l’autre. Pour repartir c’est soit par cette route soit par deux autres tout autant sinueuses et aussi longues. Curieusement, je me suis surprise à ressentir un certain poids lié à cet isolement. Mais la douceur des jours qui ont suivi m'ont bien vite fait oublier ce sentiment.

Fête de Pâques

Le soir où nous sommes arrivés, Leonidio était en fête. Il faut croire que Pâques c’est sacré ! Les rues de la ville sont bondées, les gens sont déguisés en habits traditionnels, les festins foisonnent à chaque coin de rues et le ciel est rempli de ces lanternes multicolores qui s’envolent avec la chaleur d’une flamme. Il y en a partout, le dépaysement est total… Les vacances sont belle et bien lancées !

Danses traditionnelles
Elles se poursuivent merveilleusement avec un réveil sur le petit port de Poulithra qui laisse apparaître les falaises surplombant Leonidio. Ce n'est pas tous les jours que l'on a droit à un spectacle pareil au réveil !

Dépaysement à Poulithra

La vue n’est pas le seul sens gâté. Notre odorat est lui aussi ravi en ce printemps frais avec du mimosa bourgeonnant et des effluves de fleurs d’orangers à chaque coin de rue. Le printemps vraiment une bonne période pour visiter le Péloponnèse, avec un peu de chance, il y fait encore frais et les sens sont aux anges !
 
Mimosa en fleur
Sur place, nous retrouvons Ben, Mélo, Guillaume et Goret qui sont déjà là depuis plusieurs semaines et nous conseillent sur les différents secteurs à visiter en priorité. Pour les grimpeurs dans le 7 tassé et le 8eme degré, Nifada, Elona et Twin Caves sont des secteurs immanquables. Pour le 6 et le 7, Mars et Twin Caves seront à visiter impérativement.
 
Calage de genoux à la grecque dans Wings of Life 8a+ à Nifada

Nous commençons notre tournée par Elona et ses voies plutôt courtes du secteur du bas, sous la vire. Le ferry n’ayant sûrement pas aidé, nous sommes tout mous et pas franchement vaillants… Nous faisons laborieusement « The battle of succession » 7c pour moi et « Natural Mystic » 8c pour Cédric qui réalise du coup la deuxième ascension de la voie après Guillaume Lebret quelques jours auparavant.

Bat patting 8c+/9a
La ligne de Wings of Life 8a+ et un bout du secteur de Nifada

Nous poursuivons notre tournée par Nifada accompagnés de Guillaume. Il guide Cédric dans son projet « Bat Patting » pendant que je visite la classique et certainement la plus belle voie du secteur « Wings of life » 8a+. Colos sur colos dans du bon dévers, le ton est donné. Une fois n’est pas coutume, nous nous faisons encore rouster mais repartons, sans plus de peau, complétement emballés par ce secteur et par nos voies en projet !
 
Monemvassia moderne vue de la cité antique
Déjà le besoin de repos se fait sentir et je profite du début de séjour pour emmener Cédric visiter quelques ruines… Direction Monemvassia, une cité médiévale bien conservée située à l’aplomb d’une falaise sur une presqu’île au sud du Péloponnèse. Au-dessus de la barre se trouvent des ruines d’une cité byzantine où seule l’église Agia Sofia a été restaurée de manière grandiose. Se perdre dans ces petites ruelles ou se balader au milieu des fleurs de la cité supérieure finit de nous propulser loin de chez nous.

Agia Sofia fleurie
Nous revenons à Leonidio en pleine forme et tordons tous les deux nos projets de Nifada ! Cédric propose 8c+/9a pour « Bat Patting ». Mais le plus important c’est que nos copains pyrénéens sont arrivés ! Serge et Camille découvrent les voies sur colos grecques non sans mal pour certaines… Mais vu la force de la miss, les voies même sans mettre un genou, ne font pas long feu !

Camille en plein verrouillage de biceps dans Angi Orangi 7c+

Ensuite nous passons à Twin Caves, secteur sur lequel nous reviendrons plusieurs fois pour faire les nombreuses classiques : « Bonobo » 7c jusqu’en haut entre deux colos, la voie idéale pour apprendre à poser des genoux, « Mr Magoo » et « Chipotle » 7c aussi, « Anelkysi » 8a+ et « A pig in the roof » 8b. Cette dernière m’aura posé des problèmes avec son pas de bloc en plein toit et je suis bien contente d’avoir finalement trouvé une méthode me permettant de faire le mouvement clé à tous les coups pour finalement réussir cette voie à l’opposé de mon style de prédilection. Ca progresse !


Claire découvre les genoux dans la classique Bonobo 7b+

Pendant ce temps Cédric est allé voir le seul 9a de Leonidio : « Capricorn » à la Maison des Chèvres. Après une grosse montée de travail où il trouve une méthode alternative à la méthode classique, objectivement pas franchement plus facile… Il enchaîne la voie au premier essai et la trouve clairement moins dure « Bat Patting » 8c+/9a.

Au pied de Capricorn à la Maison des Chèvres
Dormir à Leonidio n’est pas compliqué. Il y a plein de guest house et un camping qui loue également des appartements donnant sur la plage de Plaka. Pour les camions, il est possible de dormir sur le parking de la plage de Plaka mais il n’est pas recommandé d’y rester plusieurs nuits d’affilée vu la proximité du parking et du camping. Sinon il y a des places en bord de piste en montant vers le secteur d’Elona ou sur le plateau après le secteur Nifada. C’est le spot dodo que nous avons préféré même s’il est un peu loin de Leonidio. A noter enfin qu’il y a des douches chaudes sur le parking de la plage de Plaka !!

Notre spot dodo préféré
Lessive et squat sur la plage de Plaka

La vie nocturne de Leonidio se fait au Panjika, bar associatif créé par des grimpeurs, principalement pour les grimpeurs. Ce sont eux qui ont fait le topo et ce sont principalement eux qui équipent et entretiennent les falaises. Notre rythme s’établit. Après de longs petits-déjeuners au bord de la mer, nous grimpons jusqu’en fin d’après-midi pour ensuite retrouver les copains au Panjika ou autour d’un poisson pêché du jour dans l’un des nombreux restos du coin.

Un bon resto de Poulithra
 La vie est douce dans ce coin de la Grèce et ce n'est pas pour nous déplaire !

mardi 9 mai 2017

Fleur de Rocaille à Mouriès ou quand l'émotion est reine

Le projet de Fleur de Rocaille a débuté il y a près de 4 ans et peut, à juste titre, représenter la définition même du projet. Avec Fred Ripert, nous avons eu droit aux hauts et aux bas les plus classiques, ces périodes de démotivation et de doutes, ces instants de frénésie et d'exaltation, qui laissent présager un aboutissement heureux aux optimistes que nous sommes.

Je ne remercierai jamais assez Fred de m'avoir suivie sur cette idée de film et je salue ses idées aussi farfelues que poétiques qui ont donné ce caractère au film que vous allez découvrir en fin d'article. Nous sommes fiers du résultat et émus du chemin parcouru ensemble. 

Prix spécial du Jury au festival des Diablerets avec Laurence Guyon qui a écrit la voix off de Fleur de Rocaille
Photo : Olivier Broussouloux
Pour introduire le sujet ou amener à une simple réflexion, voici un texte que j'ai écrit pour la revue Passe Murailles en repensant à cette belle expérience de Fleur de Rocaille. Passe Murailles est une revue pyrénéenne sur la montagne, l'escalade, les voyages, basée sur la sincérité des expériences et qui renaquit de ses cendres en novembre dernier. Toutes les photos sont de Raphaël Fourau sauf mention.

"Qu’est-ce qui fait qu’une voie reste gravée dans la mémoire d’un grimpeur, qu’il s’en souvient des années après sa réalisation, que son corps frissonne en y repensant ? Certainement pas la cotation comme d’aucuns pourraient croire. Une émotion ne naît pas d’un chiffre, ni d’un symbole écrit ou tout au moins conventionnel. Rappelons bien que le système de cotation est là à titre indicatif pour donner des repères dans une communauté nécessitant une hiérarchie. A part ce point et celui de flatter l’égo ou le mettre à mal, c’est au choix, la cotation n’apporte pas d’autre information.

Fred Ripert suspendu dans les airs à l'arrivée au relais
Pour marquer à ce point un grimpeur, tout est question d’histoire, de partage et d’intéractions. Fleur de Rocaille est une de ses voies à mes yeux et mon histoire avec elle commence il y a près de 4 ans. Nouveaux dans la région, nous étions allés découvrir la falaise de Mouriès sur les conseils d’un ami de Vincent : François Tournois, très fort grimpeur des années 90 à aujourd’hui. Epatée par la finesse de cette lame de rocher et par la compacité de son caillou, cette falaise produisait déjà en moi un profond sentiment de respect et il s’en dégageait une sérénité étonnante.

A Mouriès, il faut être humble, la falaise est reine. Les voies d’échauffement donnent le ton. A chaque nouvelle partition proposée par le rocher, il faut s’investir entièrement, corps et esprit, et ce, dès que notre dernier appui quitte le sol. Les voies dans le 6eme degré ne se laissent pas dompter facilement. C’est au moins une évidence !

Rocher compact et plaisir
Puis mes yeux se sont posés sur cette ligne ouverte par Laurent Jacob, au centre d’un petit bout de caillou de 10 m de haut légèrement décroché de la falaise. Qui peut savoir ce qui m’a attiré dans cette ligne ? Ce qui m’a fait rêver ? Peut-être la pureté du calcaire à cet endroit, son aspect à la fois si lisse et si prisu. Mais il ne faut pas se laisser tromper par les atouts de la belle. La particularité de la falaise est de présenter des prises rentrantes, comme des fentes évasées, laissant penser du sol que les préhensions seront multiples. En revanche, une fois sur la paroi, de par sa rectitude, celle-ci semble désespérément lisse. Il est nécessaire du prendre du recul pour repérer la position de la prise visée parmi les dizaines d’autres semblant, à première vue, elles aussi, tout autant tenables. Ce type d’escalade est particulièrement exigent. Il requiert de la précision et un engagement de tout le corps à chaque mouvement. La moindre erreur laisse peu de place à une ultime réorganisation. 

Treuil et gros attirail lors du tournage de Fleur de Rocaille
Il y avait aussi ce nom, effacé puis réécrit, qui marque l’évolution et le temps qui passe.  De nos jours, ce type d’escalade est beaucoup moins ou beaucoup plus rarement apprécié que les dévers. Pour autant, l’escalade exigeante a été la quintessence de notre pratique dans les années 80. Une partie de l’histoire de l’escalade s’est écrite ici. Ma curiosité était piquée à vif de me confronter à ce qui avait pu être le haut niveau d’une époque, d’imaginer l’ambiance au pied de la falaise en collant fluo, de se remémorer ce temps qui a marqué le début de l’escalade sportive et de lui rendre hommage par l’action. Tout comme peuvent le faire dans un autre domaine les Pyrénéistes en répétant les voies Ravier, Despiau ou Rabada-Navarro.

Un nom qui laisse transparaître l'histoire
Photo : Caro
A l’ouverture, Fleur de Rocaille était cotée 8a et est devenue le premier 8a féminin après sa rélisation par Catherine Destivelle en 1986. Peu de temps après, Fleur de Rocaille sera décotée pour des raisons purement machistes. Le topo des Alpilles rend d’ailleurs hommage à ce fait en annonçant la voie comme « le 7c+ le plus 8a des Alpilles » !

Fred Ripert en pleine installation sur les fines strates de Mouriès
Mais le sujet n’est pas là. Cette voie m’a attirée et je m’y suis plongée totalement. La découverte des mouvements dans une voie nouvelle est le moment que je préfère ! Que nous réserve ce petit bout de calcaire ? Comment faut-il l’aborder ? Avec quelle intensité ? Et quels mouvements va-t-il falloir imaginer pour résoudre le problème proposé par le rocher ? L’inconnu dans toute sa splendeur et notre seule imagination comme solution de secours, c’est l’un des meilleurs moments de l’escalade libre !

Et sur ce point, Fleur de Rocaille a tenu toutes ses promesses. Il a fallu se creuser la tête en abordant chacune des sections. Une fois les solutions trouvées, l’escalade devenait moins complexe au fur et à mesure des répétitions et l’enchaînement jusqu’au dernier point de la voie s’est avéré assez rapide.

Le passage clef de Fleur de Rocaille
Ce qui m’a le plus étonné lors de ce processus de travail de voie, c’est la diffculté que j’ai eu à trouver des compagnons de cordée pour venir sur cette belle falaise. Le style d’escalade si exigent rebutait bon nombre de copains et la réputation de ce site à cotations difficiles les amenait à se décider pour d’autres sites du Sud-Est de la France. Heureusement, ma bonne copine Céline a accepté de sortir des sentiers battus, elle aussi pourtant adepte des dévers, et a jeté son dévolu sur Fleur de Rocaille.

Nous y sommes retournées plusieurs fois et même si le début de la voie se laissait faire docilement, les choses se sont compliquées dans le passage clef sommital. Deux solutions s’offraient à nous, aucune ne nous satisfaisant pleinement. Notre choix s’est finalement porté sur une séquence plus qu’aléatoire qui nous amenait au bac salvateur. Mais le propre de l’aléatoire est bien de pouvoir nous surprendre ! Alors nous l’avons essayée cette séquence jusqu’à ce que la ligne se laisse dompter, le même jour pour toutes les deux. Journée de faiblesse de Mouriès ? Ou courage et détermination bien plus marqués de notre part ? Le fait est que ce jour-là, la tension, l’émulation et le partage ont créé la plus belle des émotions - la joie de réussir à deux après des mois d’efforts – et ont rendu cette voie et ce lieu absolument indélébiles dans mon coeur et mon esprit."